mercredi 19 juin 2019

Remuante vie d'eau calme



Bichonnage de mare.
Vu petite couleuvre, crapauds, rainettes vertes... Et aussi une belle limace léopard.
Les guêpes boivent tout leur saoul et ont d'autres chats à fouetter que de venir nous asticoter quand nous sommes en train de becter.
Tout le monde vient boire à la mare, moins besoin de prendre le jus des fruits des arbres.
Bistrot de quartier, chacun ses heures, lieu de rencontres, toujours une scène à mater.
Remuante vie d'eau calme.

___

[La prohibition :  ]

"Si l'on veut saisir en son coeur l'offensive que les économistes ont livrée aux terres communales, il faut revenir à la seconde moitié du XVIIIe siècle. Car c'est, une fois de plus, à ce moment précis qu'un certain nombre de stratégies se dessinent quant à la mise en calcul d'un monde qui devra être aménagé jusqu'en ses parcelles les plus infimes. On sait que c'est à cette époque que les défrichements des forêts font rage, en même temps que le dessèchement et l'aménagement des zones humides. L'usage collectif de ces zones humides avait eu de tout temps une importance capitale pour les communautés paysannes. En dépendaient l'accès à l'eau, les différentes techniques d'irrigation, la pisciculture, la production de paillage (litières d'animaux, engrais, vignes, toitures), la culture du sel sur le littoral, la tourbe, les produits maraîchers en bordure de zone ou sur les levées alluviales.
Dès le XVIe siècle, l'assèchement des marais est perçu comme une oeuvre civilisatrice, mais c'est bien avec les physiocrates que ces opérations prennent une dimension systématique. Les zones humides sont vues comme dangereuses, inhospitalières et sauvages. Pour les physiocrates, ces lieux, vestiges des pratiques féodales, n'ont plus de raison d'être dans le système économique. Ils sont des obstacles au développement de l'agriculture, qui s'érige alors en système de captation de richesses du sol et fait oeuvre de "salubrité". Dans les campagnes comme dans les villes, le traitement des miasmes sera l'occasion de quadriller, par des mesures de contrôle disciplinaire inédites, des espaces trop opaques d'où pouvait surgir le danger de la révolte. La zone humide est vue en tout cas comme un espace de "désolation". De manière générale, les communaux sont traduits, dans une véritable haine, comme des espaces "négligés", des "cloaques immenses", des "déserts lugubres et inféconds", ce qui permet en retour aux économistes et agronomes de poser comme une absolue nécessité la transformation de ces "friches" en parcelles individuelles rationnellement cultivées."

Dans "Être Forêts" de Jean-Baptiste Vidalou.